Circulation des exciseuses et de leurs clientes : comprendre la transfrontalité de la pratique de l\’excision entre le Mali et le Burkina Faso
Auteur(s) : KONE OUSMANE ;
L’excision est une pratique culturelle ou un “marquage du corps de la femme” qui consiste à faire l’ablation d’ une partie du clitoris et/ou des petites et/ou des grandes lèvres de la fille, s’inscrivant dans la logique de l’identité culturelle des peuples qui la pratiquent. Selon l’OMS (organisation mondiale de la santé), 130 à 140 millions de femmes et de fillettes sont excisées à travers le monde[1], et 2 à 3 millions de fillettes subissent chaque année cette pratique[2]. La plupart des femmes et des fillettes excisées vivent en Afrique, précisément dans 28 pays.
Malgré ses conséquences néfastes sur la santé sexuelle et reproductive de la femme[3], la pratique de l’excision (encore appelée «mutilation génitale féminine») perdure dans certains pays à l’instar du Mali et du Burkina Faso, deux pays frontaliers, qui affichent respectivement 89 %[4] et 67,6 %[5] de femmes excisées (15-49 ans).
Dans ces deux pays, objets de notre étude, malgré les efforts des gouvernements respectifs, des acteurs de la société civile et des partenaires au développement, l’abandon de la pratique se heurte à un grand défi : la circulation des exciseuses et de leurs clientes entre les deux pays, notamment à la frontière. Ainsi, parle-t-on de plus en plus de transfrontalité de la pratique. Cette circulation spatiale des exciseuses et de leurs clientes s’explique essentiellement, d’une part, par la présence d’une loi interdisant la pratique au Burkina Faso, cela, depuis 1996, et d’autre part, par son absence totale au Mali malgré la pression des organisations féminines et des bailleurs de fonds.
À travers cette communication qui s’inscrit dans une perspective socio-anthropologique, nous tentons de comprendre et d’expliquer la dimension spatiale de cette circulation des exciseuses et de leurs clientes, notamment l’émergence de l’espace frontalier comme lieu de passage. Toute chose qui permettra de comprendre les transformations socio-spatiales favorisant (ou non) l’abandon de la pratique. Plus précisément, il s’agira de répondre aux questions suivantes: Comment se déroule, du point de vue spatial, la circulation des exciseuses et de leurs clientes à la frontière Mali-Burkina Faso? Comment ces circulations et la transfrontalité de la pratique qu’elles entraînent, constituent-elles un enjeu de genre?
Notre communication tentera de répondre à ces questions. Pour ce faire, nous nous focaliserons sur des données empiriques collectées en 2018 dans la région de Mopti (région frontalière du Mali avec le Burkina) ainsi que sur la riche littérature grise et scientifique sur le sujet.
[1] OMS (2010), Mutilations sexuelles féminines, Genève, OMS.
[2] UNICEF (2010), La dynamique du changement social : Vers l’abandon de l’excision/mutilation génitale féminine dans cinq pays africains, UNICEF/ Centre de recherche Innocenti, Florence.
[3] Valma, Joannah (2008), Évolution de la pratique et de la perception au Burkina Faso entre 1998 et 2003, Montréal, Université de Montréal.
OMS (2010), Mutilations sexuelles féminines, Genève, OMS.
[4] Institut National de la Statistique du Mali (2019), Enquête démographique et de santé du Mali 2018 (EDSM-VI), INSTAT, Bamako.
[5] Institut national de la statistique et de la démographie du Burkina Faso (2015), Enquête Multisectorielle Continue (EMC), INSD, Ouagadougou.
Mot-clé : Burkina Faso, circulation, contrôle de la sexualité féminine, exciseuses, excision, Mali, et transfrontalité
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