Association pour l’anthropologie du changement social et du développement
Association for the anthropology of social change and development

Résister à la crise au Sahel : quête de visibilité, insertion en ville et recours à l’orpaillage chez les personnes déplacées internes au Burkina Faso (2015-2021)

Auteur(s) : fornasetti pietro ; Sawadogo Kouka ; Bonsa Issouf ;

De nombreuses questions surgissent lorsqu’on s’intéresse au conflit qui touche le Burkina Faso et à ses répercussions sur la politique, l’économie et les sociétés de la région. Une manière d’aborder le problème pourrait être d’insister sur la condition dramatique et la vulnérabilité des personnes déplacées internes (PDI). Notre étude abordera autrement ces questions : en montrant non seulement la capacité d’initiative de certaines PDI face au drame de l’exile, mais aussi en analysant comment ces personnes se repositionnent dans une économie nationale qui change radicalement à cause du conflit.

Pour ce faire, nous mobiliserons des matériaux empiriques collectés au cours de deux enquêtes récentes, initialement indépendantes l’une de l’autre. Il s’agit, d’une part, d’une thèse en géographie sur la circulation des revenus miniers et ses implications territoriales dans la région des Hauts Bassins. D’autre part, d’une enquête collective et pluridisciplinaire de type ECRIS[1] menée en octobre et novembre 2021 à Ouagadougou, auprès de PDI qui avaient fui le conflit au Sahel.

L’enquête sur le secteur minier relève que, à partir des années 2015-2016, les activités d’extraction aurifère se sont progressivement éloignées nord du pays. Ainsi, dans les Hauts Bassins, on assiste à une pression accentuée et à des tensions sur les ressources aurifères, alors même qu’un nombre croissant d’orpailleurs est originaire des zones de conflit.

L’enquête sur les PDI à Ouagadougou, quant à elle, a mis en évidence que, malgré leur vécu d’une violence radicale et des situations objectives de vulnérabilité, ces personnes font preuve d’une remarquable capacité d’initiative, qui s’entremêle à des itinéraires complexes d’insertion dans le tissu urbain. L’implication des « femmes » dans le secteur du commerce « informel », la recherche d’interlocuteurs institutionnels de la part des « vieux », mais aussi l’engagement des « jeunes » dans l’orpaillage en dessinent les grands traits.

En agrégeant les résultats de ces deux enquêtes, et les hypothèses qu’elles soulèvent, notre étude profitera réellement de l’approche pluridisciplinaire pour appréhender les effets du conflit. La cartographie des migrations (forcées et de travail) que nous dresserons à l’échelle nationale, donnera l’image d’une spirale des tensions qui suivent le front pionnier aurifère et se diversifient progressivement. Pourtant, l’analyse des récits d’exile et des mobilités de travail des PDI, de leurs stratégies individuelles et familiales, permettra de rendre compte de l’économie morale dans laquelle ces différentes mobilités s’inscrivent. Car l’expérience dramatique du déplacement s’accompagne immanquablement de tentatives situées de reconstruire une société vivable.

[1] Bierschenk, Thomas et Jean-Pierre Olivier de Sardan, 2014, « ECRIS : Enquête Collective Rapide d’Identification des conflits et des groupes Stratégiques… », Bulletin de l’APAD, 7


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