Association pour l’anthropologie du changement social et du développement
Association for the anthropology of social change and development
La revanche des contextes. Des mésaventures de l’ingénierie sociale en Afrique et au-delà

La revanche des contextes. Des mésaventures de l’ingénierie sociale en Afrique et au-delà

Olivier de Sardan J.-P., 2021, La revanche des contextes. Des mésaventures de l’ingénierie sociale, en Afrique et au-delà, Paris, Karthala.

Pourquoi les projets de développement, les interventions des ONG ou les politiques publiques nationales sont-ils tous soumis à d’importants écarts entre ce qui était prévu et ce qui se passe effectivement ? Cet ouvrage apporte une réponse documentée à ce « problème des écarts ».
Les politiques publiques standardisées, telles les politiques de développement omniprésentes en Afrique, méconnaissent les contextes dans lesquels elles sont mises en oeuvre. Dans cette confrontation, les acteurs locaux jouent un rôle majeur. Les multiples stratégies de contournement des directives et protocoles officiels suivent des « normes pratiques » implicites ignorées des experts internationaux, mais que l’observation du terrain peut mettre en évidence. C’est un phénomène qui va au-delà du développement : tout se passe comme si l’Afrique révélait de façon paroxystique une revanche des contextes dont on peut trouver des exemples dans le monde entier.
Pour analyser ces processus, un dialogue est noué entre d’une part des données de terrain particulièrement riches, et d’autre part une vaste littérature en sciences sociales revisitée afin de mieux rendre compte des réalités observées.
Le diagnostic est structuré autour de quelques concepts clés : modèles voyageurs, normes pratiques, modes de gouvernance et logiques sociales. Tout entier consacré à une démarche analytique rigoureuse, sans complaisance et sans polémique, il se termine néanmoins par une prise de risque face à la redoutable question « que faire ? », en suggérant de mettre les normes pratiques au centre de toute intervention et de valoriser les « experts contextuels » aujourd’hui invisibles.
Ce livre constitue une contribution majeure à l’analyse des effets inattendus des politiques publiques.

Jean-Pierre Olivier de Sardan est directeur de recherche émérite au CNRS, directeur d’études à l’EHESS, chercheur au LASDEL (Niger), responsable scientifique du master de socio-anthropologie de la santé à l’Université Abdou Moumouni (Niger). Deux de ses nombreux ouvrages sont devenus des références internationales : Anthropologie et développement (Karthala, 1995), et La rigueur du qualitatif (Académia, 2008).

Agir pour les autres. Gouvernementalité, développement et pratique du politique

Agir pour les autres. Gouvernementalité, développement et pratique du politique

Traduction par Fadhila et Pierre-Yves le Meur de The will to improve, Governmentality, Development, and the Practice of Politics  publié en 2007 aux Duke University Press, cet ouvrage propose un remarquable récit du développement en action, centré sur une série de tentatives visant à améliorer les paysages et les modes de vie. L’auteur y expose, en détail tant les pratiques qui permettent aux experts de diagnostiquer les problèmes et de concevoir des interventions, que la capacité d’action des personnes dont les conduites sont visées par les réformes. Combinant très efficacement théorie, ethnographie et histoire, il est mis en lumière le travail d’agents de développement ayant opéré à différentes époques : fonctionnaires et missionnaires coloniaux ; spécialistes de l’agriculture, de l’hygiène et du crédit ; activistes politiques ayant créé leurs propres modèles devant guider les villageois vers des vies meilleures. L’auteur décrit et analyse des opérations visant, sur financements extérieurs, à intégrer des objectifs de conservation de la nature et de développement via la participation des communautés, ainsi qu’un programme gigantesque, d’un milliard de dollars US, conçu par la Banque mondiale pour réactiver ou réinventer la communauté villageoise, inculquer de nouveaux comportements basés sur la compétition et le choix, et reconstruire la société « par le bas ».

Démontrant que la volonté d’« agir pour les autres » a une longue et complexe histoire, souvent troublée, Tania Murray Li identifie des récurrences fortes allant de la période coloniale jusqu’à l’époque actuelle. Attentive aux spécificités du développement dans les hautes terres de Sulawesi, en Indonésie, elle montre comment une série d’interventions se sont succédées et aussi imbriquées les unes dans les autres, et elle piste leurs effets contrastés, entre bien-être et famine, suivisme et mobilisation politique, solidarités nouvelles, résistance identitaire et action violente.

La version française de l’ouvrage comprend une préface, où Pierre-Yves Le Meur (IRD/UMR GRED) met en perspective l’ouvrage pour un public francophone, et d’une postface originale où Tania Li revient sur les débats suscités par l’ouvrage et son actualité dix ans après sa première publication.

Tania Murray Li est professeur d’anthropologie à l’université de Toronto. Membre de l’Académie royale du Canada, elle a écrit plusieurs ouvrages primés, dont Land’s end : Capitalist relations on an indigenous frontier (Duke University Press, 2014) et de nombreux articles sur la terre, le travail, les classes sociales, le capitalisme, le développement, les ressources et l’autochtonie, avec un accent particulier sur l’Indonésie.

Li T. M., 2020, Agir pour les autres. Gouvernementalité, développement et pratique du politique, Coll. Hommes et sociétés, Paris/Montpellier, Karthala/APAD.

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